samedi, mai 27, 2006

Almaty



Après Turkestan, le paysage a progressivement évolué vers des milieux moins arides et la steppe c’est soudain changée en un champ de fleurs !




Parée du vermillon des coquelicots et des boules blanches des buissons fleurissants tels des moutons mousseux, la steppe verdoyante est devenue un tableau aux contrastes saisissants que le printemps a peint avec allégresse sur le bleu azuré du ciel.

Nous étions fascinés par ce spectacle quand ont commencées à se dessiner de hautes montagnes au loin. Nous avons alors longé la chaine des Tian Shan, qui marque la frontière sud du Kazakhstan avec l’Ouzbéquistan, le Kirghistan et la Chine, culminant à 7010 m.



Cette altitude de neiges éternelles contraste avec la douceur de ses contreforts onduleux et verdoyants qui ressemblent étrangement aux Alpes suisses. Après le désert que nous avions d’abord parcouru dans le Nord du Kazakhstan, nous n’aurions jamais imaginé pareille nature, verdoyante, sillonnée de jolis cours d’eau et de grands chênes aux feuilles démesurées.


Nous avons fait quelques bivouacs face à ce splendide panorama, contemplant la lumière déclinante du soleil empourprant les sommets, observant les hérons, grues et vanneaux se préparer pour la nuit et nous réjouissant de pouvoir admirer tout cela sous nos yeux.

Cela dit, après la méditation, il a fallu passer à l’action car la route ne se contente pas de suivre paisiblement ces belles montagnes, elle les traverse par un col à 1200 m, seul moyen de contourner le Kirghistan. C’est un curieux détour d’ailleurs car la route principale, qui rejoint Almaty à Shimkent et Turkestan (les grandes villes du Sud kazakh), passe par le Kirghistan et en plein milieu de sa capitale : Bishkek.
C’est très certainement parce que cette route fait partie de ce qui fut la mythique Route de la Soie et que son lointain tracé est resté l’axe majeur de communication entre les pays d’Asie Centrale. L’ironie étant que pour nous qui devrions prendre un visa kirghize si nous passions dans leur territoire, il nous a fallu pour éviter les douanes quitter la route principale pour prendre une petite route secondaire sur environ 200 km …

Mais la bonne surprise fut de trouver sur son bas-côté des dizaines d’apiculteurs itinérants installés là, avec leurs ruches tout juste sorties du semi-remorque pour vendre leur miel.


Il a ensuite fallu attaquer une longue ascension, par au moins 40°C au soleil de midi et bien évidemment avec un bon vent contraire. Notre pauvre Ami6 n’a pas trop apprécié et il nous a fallu plusieurs haltes et quelques coups d’œil dans le moteur pour s’assurer qu’elle irait jusqu’au bout. Arrivée à la passe à 1230m, elle a pu refroidir correctement dans la descente, mais c’est alors que des toussotements et soubresauts nous ont contraints à l’arrêter de nouveau. Après analyse de la situation et vérification de l’état des bougies, Stéphane en a déduit que c’était certainement l’essence qui était en cause ! Et oui c’est assez fréquent au Kazakhstan que l’essence plombée soit de très mauvaise qualité. Et dire qu’ils ont des puits de pétrole plein le pays et pas fichus d’avoir de l’essence de bonne qualité et des routes goudronnées !


L’Arrivée à Almaty fut Rock & Roll, comme souvent quand on arrive dans ces grandes villes peuplées de piètres conducteurs fous du volant, pressés, stressés et accrochés à leur klaxon. Sans compter qu’une voiture sur 3 a le volant à droite (ce sont des voitures importées du Japon) alors qu’on roule à droite, ce qui ne facilite pas la conduite ! …
Il faut ajouter à cela des dizaines de piétons figés ou courant au beau milieu de la chaussée et sur les bords, chacun choisissant son style pour tenter de traverser. Et deux paires d’yeux sont tout juste suffisantes pour sauver son aile arrière, éviter la mémé, klaxonner pour faire comme tout le monde et trouver son chemin dans cette cohue.


Nous avons tout de même réussi à nous poser devant un café pour souffler un peu et trouver un téléphone pour joindre Jean-Bernard, notre contact à Almaty.
Celui-ci s’est révélé extrêmement accueillant et généreux, nous offrant une chambre dans son immense appartement, la liberté d’utiliser la cuisine et les autres commodités, l’accès à son excellente discothèque et vidéothèque et enfin la possibilité de nous connecter à son réseau Wi-Fi ! Nous voilà encore reçus comme des rois.



C’est vraiment une chance car nous projetions de passer au moins 10 jours à Almaty pour faire nos visas, et la ville est aussi moderne que chère …


Elle fut la capitale du Kazakhstan pendant des années avant que le Président Nazarbaev ne décide il y a 10 ans de la déplacer à Astana, beaucoup plus au Nord, mettant en avant le haut risque sismique d’Almaty. En effet cette dernière fut pratiquement détruite lors d’un tremblement de terre en 1911. Seule resta debout la cathédrale entièrement de bois du parc Panfilov qui date de l’époque des tzars !

Ainsi la ville entièrement reconstruite a une architecture très moderne et est organisée selon des rues toutes perpendiculaires comme aux Etats-Unis. C’est resté la capitale économique du pays et les marques de luxe sont toutes représentées en centre ville.

Heureusement les trottoirs tous arborés lui donnent un caractère sympathique et protègent de la chaleur déjà écrasante de certaines journées. La proximité des montagnes qui se déploient sur tout l’horizon au Sud agrémente encore cette impression.


Mais si l’on prend un petit peu d’altitude en montant sur les collines alentour, on est alors estomaqué par la couche de pollution qui plane sur la ville. C’est carrément écœurant.



A côté de cette image très occidentale, le haut lieu du commerce reste heureusement les « bazars » ! Un vrai bonheur de se laisser brasser dans cette foule bigarée qui se presse autours des étalages les plus variés. Les odeurs et les sons vous assaillent immédiatement et vous enchantent ou vous écoeurent, les deux en même temps !

Tout est cependant assez bien organisé et se succèdent le coin des chaussures, celui des vêtements, puis les ustensiles de cuisine, les fruits et légumes, la viande etc, etc … Mais le tout est tellement envoutant que nous avons fait 7 km en bus bondé et roulant par l’opération de St Christophe, pour aller visiter le plus grand d’Almaty, qui doit s’étaler sur plus de 5 km !



C’était la partie la plus sympathique de notre séjour à Almaty, mais malheureusement nous n’étions pas venus pour le shopping mais pour les formalités de visa … Et cela fut, nettement moins sympathique ! Car il fallait compter sans l’ambassade de Russie, une aventure … ou un cauchemar, au choix …

Nous avons commencé par nous préoccuper du visa mongol, nécessaire pour obtenir le visa de transit pour la Russie. Nous étions les seuls « demandeurs » devant l’ambassade et le consul mongol semblait bien seul dans cet édifice où il faisait tout, même le portier. Il fut cependant bigrement efficace et s’il n’avait pas eu un problème informatique, nous aurions eu nos visas en 2h.
Le plus difficile fut de trouver le consulat. Caché dans un faubourg d’Almaty, à 7 km du centre, le moyen le plus facile pour s’y rendre était de prendre un taxi. Seulement les taxis « officiels » sont rarissimes et chers. Ainsi tout le monde utilise la méthode de la main levée pour héler n’importe quelle voiture qui passe et qui veut bien vous prendre. Une sorte de stop payant, qui fonctionne extrêmement bien en ville car la quantité de véhicules est phénoménale et que chacun y trouve son compte : moins cher pour les passagers et un peu d’argent contre un petit détour pour le conducteur …

Une fois le visa mongol en poche, tout contents nous nous présentons à l’ambassade de Russie. Et là commença l’attente infernale ! Il nous faudra 2 jours à attendre devant la grille pour que Monsieur le consul daigne nous recevoir. Il faut dire qu’on entre au compte goutte car il doit voir 1 à 2 personnes par demi-journée, et encore ! …
De quoi user les nerfs des plus patients.
On est parvenus à rentrer le 1er jour vers 11h30. Mais on nous a gentiment raccompagné à la sortie car ça allait être la pause déjeuner : revenir à 15h. Manque de pot on est jamais plus re- rentrés de la journée et Emma s’est fait un début d’insolation devant les grilles en plein soleil.

Quand finalement Monsieur a accepté (le 2em jour) de nous rencontrer, il a épluché notre dossier ligne par ligne et nous a renvoyé au consulat de France pour faire traduire et certifier nos documents d’assurance !
Nous partions confiants à l’autre bout de la ville retrouver des compatriotes. Que neni ! Ils ne font ni traduction ni certification de documents rédigés en russe et ils nous renvoient chez un notaire ! Mais allez trouver un notaire kazakh qui lise le français pour l’écrire en russe !
Là on a commencé à péter les plombs …
On est retournés au consulat de France et on a supplié la petite secrétaire de nous traduire notre lettre en russe. Elle a gentiment accepté mais l’a rédigé à la main car elle n’avait pas d’ordinateur ! Il nous a donc fallu trouver un café internet avec une imprimante et des claviers russes, bien sur. Et nous voila partit à essayer de déchiffrer du russe en lettres minuscules pour le taper en majuscules. Inutile de dire qu’au bout de 10 mn on avait écrit 2 mots et pleins de fautes … Heureusement l’employé du café est gentiment venu se porter à notre secours et a tapé la lettre pour nous ! Sympa le garçon.
Nous voila alors repartis à l’ambassade de France faire le forcing pour avoir le tampon certifié conforme. La consule a finit par accepter mais moyennant 15 Euros par lettre !!! Ca fait cher l’encre tout de même.

Cette fois tous les documents sont réunis pour le russe tatillon (le mot est très très édulcoré ).
On retraverse la ville, on retrouve nos grilles maintenant familières, on reprend notre attente favorite pendant 1 heure … et le portier nous annonce que le consul (en pleine forme le matin même) est maintenant …MALADE !!!! Là que ferait une personne saine d’esprit ?
Elle se jette sur la grille ?
Elle fond en pleurs … ?
Ben elle a pas le choix, elle revient le lendemain … !
Mais on ne vous cache pas que nous étions à la fois furax et déprimés. D’autant plus qu’il nous faut quitter Almaty au plus tard le 27 Mai avant que notre visa n’expire. Ce petit jeu ne peut pas durer éternellement ! Sachant nous devons passer en Russie uniquement pour pouvoir entrer en Mongolie…
Heureusement le gentil portier ayant vu nos mines déconfites la veille nous a fait entrer les premiers le lendemain matin (on était devenus potes depuis le temps !). Le méchant consul n’était pas malade et avait décidé de bien vouloir travailler ce matin !
On a eu l’impression de passer un examen quand il a épluché à nouveau nos dossiers. On ne vous dit pas le soulagement quand il a finalement agrafé les paperasses. Et on est ressortis à midi AVEC NOTRE VISA RUSSE !
Au final, l’aventure nous a couté la bagatelle de 11 500 Tengués (80 Euros) chacun, sans compter les taxis.
Mais on y a gagné quelques copains, ce qui sera le seul bon côté de l’histoire : un couple germano-espagnole qui revenait d’Inde, et un couple de français qui font un super périple dans les ex-pays d’Union Soviétique et dont voici le site internet très intéressant, où on vous recommande d’aller jeter un oeil :
http://www.15ans15pays.com/
Du coup on a fêté ensemble comme il se devait l’obtention de nos visas ….russes …. à la vodka ! … Mais nous ne publierons pas les photos …

Après tout cela Stéphane a enfin pu se consacrer à la révision mécanique qu’il avait programmée depuis l’arrivée à Almaty.
Il lui fallait solutionner un problème de pas de vis de bougie sur le cylindre gauche, ce qui n’a pas été une mince affaire. Il nous faudra 2 jours pour trouver les pièces et le garage pour nous aider. Mais on vous passe les détails, un peu trop techniques.

Nous avons tout de même trouvé le temps de nous balader un peu dans cette vaste cité dont les longues avenues vous coupent les jambes, de visiter le musée consacré à l’histoire du Kazakhstan et dont tout un étage est entièrement réservé à la présidence de Nazarbaev …(sic) et de profiter un peu des multiples « Pectopah » et cafés de la ville.
Cette pause fort occidentale fut agréable mais nous avons hâte de reprendre la route et de quitter cette terrible pollution, aussi bien aérienne que sonore. Nous retrouverons nos chers bivouacs et surtout notre fidèle Ami dés demain.


Nous quitterons le Kazakhstan pas Semipalatinsk au Nord pour une liaison de 1200km en Russie qui nous fera traverser l’Altai pour atteindre le seul poste frontière à l’Ouest de la Mongolie : Bayan Olgi, le 4 Juin. On touche au but !








On the road again et à bientôt ...

vendredi, mai 12, 2006

la route d'Aral


La route jusqu’à Aral promettant d’être assez désertique et aride nous avons fait le plein en eau et en vivres avant de quitter Atyrau. Fin prêts et motivés pour affronter la rigueur de la steppe, nous hésitions presque à prendre les pistes pour couper au plus court car la route fait un énorme détour par le Nord.
Nous n’allions pas être déçus car en fait de route c’est un reste d’asphalte défoncée. Nous pensions avoir tout vu en Roumanie, mais ici cela dépasse l’entendement. Nous n’allions pas tarder à comprendre pourquoi nous étions si seuls sur ce gruyère, c’est parce que les quelques véhicules qui tentent la liaison prennent tous les pistes qui longent la route. Du coup nous avons eu notre compte de piste et avons vite oublié l’idée de couper à travers tant la trajectoire principale était déjà de mauvaise qualité et le risque de se perdre était grand.


Nous pensions faire les 1000 km qui nous séparaient d’Aral en 2 jours, il nous en faudra 4 bien remplis à un rythme de 30 km/h de moyenne environ ! Car même les pistes étaient par endroits truffées d’ornières et ravinées par les camions.


Nous avons d’ailleurs eu pitié d’eux car on en a vu un grand nombre en panne ou ensablés. Quand on pense que c’est certainement leur quotidien …


L’Ami6 nous a prouvé ici toutes ses qualités car elle est passée partout aussi bien qu’un 4x4. Il fallait voir les autres voitures posées sur le châssis au milieu des pistes !
Mais nous avions quand même bien préparé la voiture en lui rajoutant un sabot qui s’est avéré salutaire sur les pistes et en aillant monté les roues tout terrain avant de quitter Atyrau.
Même pas une panne d’essence sur ce parcours pourtant bien isolé.

Nous avons quand même acheté 5 l de sécurité à une famille au bord de la route. Ils étaient sympathiques mais nous ont bien roulés en nous vendant l’essence deux fois plus cher, nous affirmant qu’il n’y avait pas une station avant 300km. On s’est aperçus en les quittant qu’il y avant un poste d’essence à la sortie du village ! … Ce n’est pas grave c’est le jeu…


Ce fut quand même une liaison éprouvante qui nous a demandé un maximum de concentration. Mais cela fut compensé par la beauté sauvage des paysages et la quantité d’espèces animales observées. L’horizon infiniment loin et les contrastes des couleurs changeantes de la steppe nous ont donné des bouffées d’enthousiasme.

On a cependant commencé à douter de pouvoir traverser le Kazakhstan dans le mois impartit par notre visa si toutes les routes sont aussi dégradées. Mais à 100km d’Aral, en changeant de province, nous avons enfin retrouvé ce que l’on appelle chez nous une route !

Nous sommes arrivés à Aral de nuit, exténués, et les lumières enfin à l’horizon du désert ont illuminé notre courage émoussé. Ce fut notre liaison la plus difficile depuis le début du voyage. Nous n’avions qu’une idée en tête : prendre une douche pour nous décrasser de 4 jours de poussière, dans le seul hôtel d’Aral. A peine arrivés dans la chambre on se précipite dans la salle de bain : pas de douche ! On cherche alors dans le couloir des douches communes : Rien ! On est donc redescendu à la réception s’enquérir d’un point d’eau et on nous apprend que pour la salle de bain c’est la chambre « luxe ». Va pour la « luxe » au double de prix, on a trop besoin de se laver. On a finit dans un véritable appartement où on aurait pu inviter 15 personnes à manger, vaisselle comprise !
Après un décrassage et une nuit réparatrice, nous avons enfin découvert la ville et son fameux port…


Comment retrouver les mots qui nous venaient en marchant dans ce qui était autrefois la mer … Triste ! C’est bien le 1er qui vient à l’esprit. Désolé, abandonné, sal, pollué viennent ensuite … Ces carcasses laissées là telle qu’elles, rappellent cruellement leur triste sort. Comme des tombes gigantesques de ces pauvres marins et de leur mer. Une sensation de petite mort plane sur tout cela.


Et les enfants, avec leur éternelle insouciance et joie de vivre jouent maintenant dans les épaves au lieu de faire des pâtés sur la plage ! Pourtant du sable ils en ont à ne savoir qu’en faire, il n’y a plus que cela ! On a vraiment du mal à imaginer, même en fermant les yeux les reflets d’une eau bleue à la place de cette terre désolée.


Le port, certainement animé autrefois ressemble maintenant à un terrain vague où flottent les sacs plastiques.
Et la place du village où l’on devait vendre le poisson à la criée est aujourd’hui aussi déserte que le paysage autour de la ville. Il n’y passe plus que le vent qui fait tourbillonner la poussière en bourrasques.

Nous avons alors renoncé à essayer d’atteindre la mer d’Aral pour plusieurs raisons :
Tout d’abord la route qui s’en approche est certainement très mauvaise et il aurait fallu une journée pour parcourir les 200 km aller retour dans un vent violent. De plus nous n’étions pas surs de pouvoir y accéder car le dernier village est encore loin de la mer. Enfin la perspective de voir encore des bateaux rouillés ne nous motivait plus guère, c’était plus attristant que nous ne l’avions imaginé.



La seule lumière dans cette citée abandonnée aux démons du vent fut les enfants qui nous ont accompagnés partout, sans rien demander, en nous regardant avec curiosité. Sans avoir pu communiquer, nous avons échangé avec ce que nous avions : des regards et des sourires.





Le plus scandaleux dans ce désastre est qu’il ne s’agit pas d’un accident ! En 1950 les planificateurs soviétiques qui décidèrent d’utiliser pour la production de coton le Syr Daria et l’Amou Daria, les deux grands fleuves qui alimentaient autrefois la mer d’Aral, savaient qu’ils provoqueraient son assèchement. La quantité d’eau prélevée pour l’irrigation fut si énorme qu’entre 1966 et 1993 le niveau de la mer d’Aral chuta de plus de 16 m et ses rives orientales et méridionales reculèrent de 80 km !
Les conséquences de ce rétrécissement ont eu des répercussions multiples :
Tout d’abord sur le climat : les hivers sont plus froids et les été plus chauds et plus secs.
Le sel, le sable et la poussière des zones asséchées se déplacent à des centaines de kilomètres à la ronde sous forme de tempêtes qui ramassent au passage les résidus chimiques des terres cultivées. Les populations locales parlent déjà d’un désert d’Akkoum .
Les problèmes sanitaires font froid dans le dos et tout un éventail de maladies se développent depuis.

Nous avons finalement fuit l’ancien port et ses fantômes, en nous faisant délester au passage de 1000 Tengués par la police locale. Et oui nous avions échappé à la corruption jusque là, elle nous a rattrapée à Aral …


Le vent fou de la ville ne nous a alors plus quittés et malgré la route maintenant de bonne qualité, nous n’avons pu rouler à plus de 60 km/h au lieu des 75-80 km/h habituels !



Il nous a fallu 2 jours pour atteindre Turkestan à 450 km plus au sud, à l’orée du désert du Kyzylkoum. C‘est ici que se trouve un haut lieu de pélerinage de l’Islam : le Mausolée de Kozha Akhmed Yasaui, premier grand sage du monde turc. Erigé par Tamerlan (grand conquérant qui succéda à Gengis Khan) à la fin du XIVe siècle, l’immense édifice a retrouvé sa splendeur grâce aux travaux de restauration financés par le gouvernement turc.
Ce tombeau abrite la sépulture d’un grand sage soufi. Cette branche de l’Islam est considérée comme une des plus modérée et d’un aspect plus individualiste, ce qui était plus compatible avec le mode de vie nomade des populations d’Asie centrale. Cela explique peut-être pourquoi c’est ce mouvement qui domine aujourd’hui dans cette région du monde. Le soufisme est organisé sous forme de confréries autour d’un lieu saint, souvent le tombeau du fondateur.

Mais la façade restée à jamais inachevée, donne l’impression que l’édifice est suspendu dans le temps. Comme s’il n’appartenait pas seulement au passé mais que ses artisans avaient juste pris une pause avant de revenir terminer leur œuvre. Ainsi même en n’ayant pas les mêmes appartenances religieuses que les pèlerins on se sent emprunts de respect et de recueillement dans ce lieu hors du temps.

Ces haltes culturelles nous reposent des longues liaisons du Kazakhstan (d’une superficie de 2 717 300 km 2 ). Il nous faudrait certainement plusieurs mois pour le visiter complètement. Mais si nous voulons être au 1er Juin en Mongolie, nous devons rejoindre Almaty assez rapidement pour faire les visas russe et mongol afin de poursuivre notre périple.


PS : Toutes les photos peuvent etre agrandies en cliquant dessus

jeudi, mai 04, 2006

La Russie : Part 1



Le début du marathon Russie a commencé a 6h du matin pour pouvoir poster le blog avant de prendre le bateau. Le temps était compté, et comme si tout ça manquait un peu de piquant nous avons eu droit à notre première crevaison en quittant l’hôtel. Changement de roue a 7h du mat, à jeun. Heureusement la grosse pluie de la nuit venait de cesser.
On est quand même arrivés à temps au bateau, pour une traversée sur la mer d’Azove qui n’a pris qu’une demi-heure. Par chance nous avons rencontré à bord un groupe de sismologues russes qui parlaient parfaitement anglais. Nous ne le savions pas alors mais l’un d’entre eux serait notre « ange gardien » pendant tout le long des interminables formalités de la douane russe …
Thank you Alexandre, without you we would steel be there !!
En effet les russes ne sont pas méchants, ils sont juste affreusement procéduriers !
Même pour un citoyen russe c’est un vrai casse-tête administratif, une horreur !
En plus pour vous rendre un peu plus chèvre ils ont répartit les formalités en deux guichets, face à face. Il faut passer de l’un à l’autre avec différents papiers, et même courir à l’autre bout de la douane sous la pluie pour avoir le document qui te permettra ensuite seulement d’avoir « l’Officiel » … Quand on ne te fait pas remplir un Xieme formulaire en double, pour finalement te dire de le jeter ! C’est digne d’Asterix !
Sans compter qu’avant l’aberration administrative, il a fallu affronter les douaniers, avec le passage de la voiture au flair de 2 chiens, et même un coup de miroir sous le chassis au cas où il serait truffé d’armes. Le tout sous l’œil d’un grand gaillard qui ne cessait pas de répéter les bras croisés : « Prroblem ! ». On a finit par savoir que c’était le poids des bagages embarqués qui lui posait problème. Normalement on ne doit pas excéder 20 kg par personne. On se croirait à Air France ! On s’en est finalement bien sortis, toujours avec le sourire. Mais si Alexandre (le monsieur en rouge) n’avait pas pris sur son temps et fait toutes les traductions pour nous, nous n’aurions jamais su comment remplir toutes les paperasses, essentielles pour avoir l’autorisation d’entrer dans le pays.


Et le plus « drôle » c’est que 10 km après la douane, se profile le premier « check point » policier (au cas où on serait passés en fraude !!!!!). On s’apercevra que ces contrôles ponctuent toutes les entrées et sorties des villes pour savoir « d’où tu viens, où tu vas, et ce que tu transportes ». On a du être contrôlés environ 12 fois en 1 300km.
On a même été arrêtés pour excès de vitesse !!! (notre premier) 60 km/h au lieu de 40. Mais devant notre mine contrite et notre belle Ami, le policier nous a laissé repartir !!! On en revenait pas.

Apres une nuit de repos bien mérité au bord d’un lac, nous avons fait notre plus grosse liaison le lendemain : 600 km de route enfin en bon état. Le trajet s’est révélé moins pénible que nous ne l’imaginions car les paysages variés nous ont menés des grands champs cultivés bordés d’arbres, à une immense steppe verdoyante et légèrement vallonnée. Le long trajet a été ponctué par les contrôles policiers, les passages des troupeaux de vaches sur la route, et nos premières observations de Grues demoiselles et de Buses féroces (c’est le nom de l’espèce).

La ville d’Elista, notre étape pour la nuit émergea enfin au milieu de la steppe. Et là comme pour s’accorder avec le paysage le pompiste de la première station était mongol ! Mais nous n’avons pas tardé à arrondir les yeux de surprise quand en s’approchant de la ville nous ne croisâmes que des visages aux yeux bridés ! Nous avons alors découvert que la ville était parsemée de petits temples aux allures de pagodes et comble : un moulin à prières immense se dressait sur la place principale !
On s’est franchement demandés où nous étions tombés, par quel miracle étions nous déjà arrivés en Mongolie ?
Nous avons dû faire des recherches sur internet pour essayer de comprendre la présence de cette étonnante communauté mongole en pleine Russie. Nous avons alors appris qu’il existe de véritables républiques autonomes intégrées dans la Fédération de Russie, et déterminées par une spécificité ethnique, religieuse ou historique. Nous étions ainsi entrés sans le savoir en Kalmoukie, région peuplée en majorité par une ethnie d’origine mongole, et dont Elista est la capitale.
Ces anciens nomades sont venus s’installer ici au 17e siècle pour trouver de nouveaux pâturages. Mais encore une fois cette minorité a fait les frais du communisme et beaucoup ont été déportés en Sibérie, et les lamas emprisonnés ou mis dans des camps de travail. Après la chute du communisme les kalmouks sont revenus et la pratique du bouddhisme a été tolérée. Aujourd’hui la capitale reflète une drôle d’atmosphère : à la fois sa grande avenue et ses immenses bâtiments soviétiques ont une certaine froideur, et en même temps ses petits temples colorés, ses statues représentant dragons et boudhas, son parc avec ses petits ponts de bois, tout cela semble à la fois incongru mais chaleureux et sympathique.
L’ironie du sort nous a menés ici, en pleine communauté mongole, alors que nous ne connaissions même pas l’existence des kalmouks en Russie. Cela nous a mis du baume au cœur et nous a encouragé sur notre voie : Nous sommes sur le bon chemin semblait vouloir nous dire notre étoile…

Nous avons donc poursuivit en direction de l’avant-dernière mer de notre route de l’eau (et oui déjà !) : la mer Caspienne.
Nous atteignions le lendemain le delta de la Volga à Astrakan. Cette jolie ville qui longe le fleuve semble habitée essentiellement de pêcheurs à la ligne ! C’était amusant de voir les rangées de pêcheurs sur l’immense pont, qui doit surplomber le fleuve à au moins 20 m de haut, lancer des lignes interminables pour atteindre l’eau ! Mais c’était apparemment efficace et tout le monde ne cessait d’attraper du poisson. La Volga doit être un vrai vivier car les lignes étaient lancées non seulement du pont mais aussi des berges et de centaines de petits bateaux sur l’eau !
En plus de son « intérêt » piscicole, la ville est plutôt sympathique, son centre est très animé et original : entouré d’un rempart et de tours il cache une très belle église orthodoxe et une place ou les jeunes boivent la nuit et les anciens se promènent le jour. Il cache aussi autre chose, mais alors la très très bien : c’est son café internet ! Si Stéphane n’avait pas tenté une ultime demande à une 15eme personne (alors qu’Emmanuelle avait renoncé à le dénicher) nous n’aurions jamais su trouver LE café internet d’Astrakan. Il a fallu que l’autochtone nous amène carrément devant les ordis dans une pièce au fond d’un bureau de poste ou « Internet » n’était écrit nulle part.


Nous avons voulu passer notre dernière nuit en Russie dans le delta de la Volga. Par hasard c’est un petit bac qui nous a menés à un coin sympa au bord de l’eau sous des saules.
Nous avions décidé d’être de bonne heure à la frontière le lendemain en prévision des longues formalités de douane.
La décision c’est avérée fort sage car arrivés à midi côté russe, nous sommes ressortis à 18h côté Kazakh !
On vous passe les détails car vous pourriez finir aussi fatigués que nous en ressortant !
On a quand même eu la force de faire 150 km pour se plonger dans ce nouveau pays qui contraste enfin définitivement avec tout ce que nous avons vu jusqu’alors. A peine la frontière passée nous sommes accueillis par des dunes de sable, les premiers chameaux et les chevaux par centaine, libres !

Ca y est nous y sommes : Le Kazakhstan ! Nous avons peine à le croire et ne cessons de nous le répéter, pour être bien surs !

Nous nous sommes même arrêtés pour voir les chameaux de près ! Premier contact émouvant avec ce petit aussi curieux que nous.





On a finalement atteint la mer Caspienne par des pistes de sable blanc. Etonnant rivage aussi calme qu’un lac et parsemé de touffes de roseaux. Les pieds dans le sable nous ferons notre premier bivouac kazakh. Nous serons même visités par deux pêcheurs en side-car, qui naviguent aussi au GPS ! Ils ont été étonnés de voir que notre moteur fait la même cylindrée que leur moto. A la vue des grosses carcasses de poissons restées sur la plage, il faut croire qu’ils pêchent encore du gros. L’esturgeon est le poisson roi pour sa production de caviar. Mais l’avenir de la mer et des pêcheurs est sérieusement menacé d’une part par la découverte dans la mer Caspienne en 2000 de très importants gisements pétroliers. D’autre part par le déversement des eaux usées sur les zones côtières qui a déjà engendré de graves problèmes sanitaires.
Mais ces problèmes sont loin de préoccuper les investisseurs venus du monde entiers, attirés par la manne pétrolière. Et certaines villes comme Atyrau connaissent un boum économique sans précédent.
Située sur notre trajet, elle était un passage obligé pour retirer des devises locales (le Tengué), refaire un petit check de la voiture, décrasser nos vêtements et trouver un café internet !

Cette « ville du pétrole » régnant sur les plus grands champs pétrolifères du pays nous a fait penser à Dubaï. Les immeubles y poussent comme des champignons sur la steppe.
Elle est traversée de part en part par le fleuve Oural, qui délimite sur sa rive Ouest l’Europe, et sur la rive Est l’Asie ! La ville semble ainsi partagée entre les deux et affiche un curieux mélange de bâtiments ultra modernes à l’occidentale et de petites boutiques tenues par des asiatiques.


En traversant le pont Abay sur l’Oural nous sommes ainsi passés pour de bon en Asie. Une petite guérite placée de chaque côté annonce même l’arrivée sur l’un ou l’autre continent. C’est si simple parfois de voyager, il suffit de traverser un pont ! Nous avons bien sûr pris un hôtel du côté asiatique et pour une fois nous avons eu la vue sur le fleuve, comme pour dire au revoir à l’Europe en face, avant de s’enfoncer en Asie. Nous réalisons alors que nous avons parcouru 8 453 km pour atteindre cette frontière géographique !
Et nous sommes heureux et assez fiers d’y être arrivés, avec en plus aucun problème mécanique majeur. Maintenant les gens commencent à ne plus être trop étonnés que nous allions en Mongolie, mais plutôt que nous soyons arrivés jusque là depuis la France ! Ils ne situent d’ailleurs pas trop la Croatie, la Serbie et même la Roumanie et n’ont pas l’air de bien connaître Citroën.
En effet jusqu’en Russie la voiture était connue grâce à (tenez vous bien) : Fantômas !!! On s’est fait appeler comme ça entre autre par les douaniers depuis la Roumanie. En Russie quelqu’un l’a même écrit dans la poussière du pare-brise ! Du coup on a été voir dans un magasin de CD et on l’a trouvé en DVD ! Voila notre programme ciné du soir : De Funes doublé en Russe ! Un régal ! Comme quoi on n’imagine jamais ce qui peut avoir du succès à l’export.


Nous repartons maintenant direction la mer d’Aral, the ultimate one…
Les cafés internet devenant de plus en plus difficiles à trouver, nous ne pourrons certainement pas renouveler le blog aussi souvent dorénavant …
Alors la suite … quand le hasard le voudra …